Rencontre avec Thomas Ballèvre, de la promotion 2019 de l’incubateur.

Quel est ton univers chorégraphique ? 

La danse est pour moi un réflexe naturel et archaïque.

Je travaille en partie sur la déstructuration du mouvement et du geste conscient, et part à la recherche de ses instincts primaires. Je me renseigne dans divers domaines tels que la santé (travail sur l’art primaire avec des personnes aux différents handicapes mentaux), la religion (danse primaire sur des rythmes/chants religieux menant à un état de transe, comparable à ceux des clubbers en soirée sur de la musique techno, etc). Ces éléments sont pour moi une source d’inspiration très présente de mon travail de recherche et d’application du mouvement.

J’aime explorer cette danse non performative. Cette danse primaire/archaïque. Celle du quotidien. La retraduire différemment, avec une certaine franchise, ou un certain point de vue. Sur Quand la dent tomba, elle est reconduite par la manipulation des mots et des concepts après une déconstruction des acquis, et/ou « habitudes » du mouvement. Une recherche de ce fameux mouvement primaire. Cette exploration à demandé de nombreuses heures d’improvisations. Le plus important était cette préparation du danseur. La re-construction fut beaucoup plus simple. Les interprètes étant en parti dé-formaté, ils étaient plus malléable à ces nouvelles définitions ; enclin à emprunter de nouveaux chemins.

De plus, le numérique tiens une place importante dans mon travail. Les arts dit « vivants » se retrouvent souvent exploités sous une seconde forme, plus virtuelle. Tout comme les arts numériques utilises des formes d’expressions vivantes au service de leur art. Travailler et approfondir mes recherches dans ce domaine sont pour moi très enrichissantes. Actuellement je collabore avec des professionnels de l’audiovisuel ainsi que des artistes vidéastes sur différent projets. J’aimerais être en mesure de connaître et d’apporter une idée plus établie de ce qui serait au service de l’art chorégraphique et performatif. Développer une sensibilité et une culture plus pointues dans ce domaine. Pourquoi pas commencer à réaliser mes propres travaux audiovisuels.

Peux-tu nous dire quelques mots sur ta création en cours ? 

Ma création en cours à pour nom Autopilot / Pilotage automatique. Sur ce nouveau projet j’aimerai particulièrement m’intéresser à la danse en milieu festif : soirée entre amis, en club, en rave party, concert,… De plus en plus je prête attention à ces danseurs d’un soir. Comment par la musique, par l’ambiance sociale, l’environnement et/ou les substances, ces personnes se retrouvent à mobiliser leur corps. Sachant qu’ils n’ont pas eu de formation du mouvement, aucun apprentissage. Parfois je perçois également des systèmes d’imitation entre ces personnes, certaines se réunissent en fonction de leur « manière de bouger ». Des groupes de danse identitaires se détachent, d’autres personnes dansent pour elles.

D’après certaines lectures sur les réflexes primaires/archaïques, ils seraient liés au système nerveux. Cela expliquerait la sensation du mode pilotage automatique que certaines personnes éprouvent. Sensation déjà ressentit mais après plusieurs heures de danse sur de la musique techno. On parle ici de mouvements automatiques (comme la marche). Il est prouvé aussi que le rythme cardiaque change après plusieurs heures de musique répétitive. Quelles autres influences sur notre corps a la musique ? Quel rôle a-t-elle dans nos soirées ?

Tout cela s’apparente à des états de transe. On serait donc en parti inconscient, et les mouvements produits par notre corps seraient donc des formes de réflexe. On peut également parler de mémoire du corps. Suite à ces réflexions et recherches, je souhaiterais travailler au côté de personnes dépourvus de formation, brut d’apprentissage de la danse. Exploiter ces pages blanches ornées de leur mouvements naïfs.

J’envisage ce projet en plusieurs solo qui présenterait une multitude de traduction de cette recherche. Chaque solo sera une représentation, une vision différente de cet état de corps.

Pourquoi avoir rejoint l’incubateur de chorégraphes ? 

En plus de me donner la chance de travailler sur ce projet, cette formation compléterait mon parcours en m’apportant plus de connaissances, que ce soit sur la création d’une compagnie ou la mise en scène. Elle serait pour moi un tremplin pour enfin m’établir en tant qu’artiste chorégraphique et créer ma compagnie. Après avoir l’envie, il me faut maintenant quelques outils, outils que l’incubateur de chorégraphes peut me fournir il me semble. Je vois cette formation comme un soutien considérable.