L’espace du studio vous semble réducteur ? Vous souhaitez jouer avec les perspectives ? Oser aller au contact d’un·e spectateur·trice ? Voici un rapide panorama de la danse en extérieur, par Lucile Rimbert, chorégraphe, ancienne présidente de la fédération nationale des arts de la rue et intervenante pour notre formation « Ecriture chorégraphique dans l’espace public ». En 2019, Lucile développera avec sa compagnie un projet de territoire original – hybridant arts et urbanisme – au sein du quartier politique de la ville Neuhof-Meinau (Strasbourg).

ROOF PIECE / Chorégraphe : Trisha Brown, Trisha Brown Compagny

1. L’apparition des happenings chorégraphiques dans la ville

Les arts de la rue émergent dans les années 1960-1970 dans un contexte artistique global de renouvellement. La rue devient un lieu d’expression par les compagnies. La danse sort alors du studio et expérimente ce terrain de jeu. La chorégraphe Trisha Brown, figure de la danse post-moderne, crée en 1971 une pièce sur les toits newyorkais : Roof Piece. Elle sera également la première à descendre le long des façades des gratte-ciels.

ROOF PIECE / Chorégraphe : Trisha Brown, Trisha Brown Compagny

Tandis que les années 60 et 70 sont l’âge d’or des happenings, les années 1980 voient l’apparition des festivals. Les arts de la rue sont en plein développement et les événements « hors-formats » surgissent dans la ville pour y créer des surprises de grande ampleur. En 1983 et 1984, Danseurs Tous en Seine d’Odile Azagury fait date dans l’histoire de la danse. De nuit, le public embarque sur un bateau-mouche pour une traversée chorégraphiée de Paris. Les tableaux de danse se succèdent le long des quais grâce aux 300 danseur·se·s en 1983, et aux 500 danseur·se·s, l’année suivante, qui y participent.

2. Quand la ville induit la danse : les cultures urbaines

Tandis que dans les années 1990 les arts de la rue se structurent et commencent à bénéficier d’une reconnaissance institutionnelle, la culture hip-hop explose. Graff, DJ-ing, rap, breakdance, les expressions artistiques sont multiples. Du côté de la danse, le breakdance, les danses dites « debout », le voguing ou encore le krump en sont des illustrations.

Teaser : Rize, film documentaire sur le Krump en banlieue de Los Angeles / Réalisateur : David Lachapelle

Aujourd’hui, la danse hip-hop est reconnue et les chorégraphes investissent les salles ou les espaces publics, à l’image de la compagnie Dyptik. Installée en Auvergne-Rhône-Alpes, cette compagnie a créé en 2016, D-Construction, un dispositif bi-frontal. Les spectateur·trice·s se font face, de part et d’autre d’un grillage.

D-CONSTRUCTION / Chorégraphe : Mehdi Meghari, compagnie Dyptik

3. Filmer le corps dans toutes ces « espèces d’espaces »

En inscrivant le corps dans l’espace public et en questionnant cette échelle (« à l’échelle du corps humain »), architectes, plasticiens, paysagistes, photographes et vidéastes développent des collaborations avec le milieu de la danse. Graphiques, les propositions jouent sur les perspectives et les rapports d’échelle. Réalisé en 2005, le Petit vocabulaire danse/architecture de Julie Desprairies, plasticienne puis chorégraphe, est à découvrir.

Extrait : Petit vocabulaire danse/architecture / Chorégraphe et auteur : Julie Desprairies / Interprètes : Nedjma Merahi, Olivier Renouf

Puis, dans les années 2000 et 2010, avec la multiplication des moyens techniques adéquats et des plateformes de diffusion sur Internet, la vidéodanse prend son essor. Entre autres, Nadia Vadori-Gauthier met en ligne une minute de danse par jour, telle une performance au long cours.

4. La danse qui nous surprend, au plus près, dans notre quotidien

La convocation publique n’est pas toujours obligatoire. En 2009, Pedro Garcia programme au sein de festival Chalon dans la rue Les Miniatures de Nathalie Pernette sans l’annoncer dans le programme. Habitant·e·s et artistes ne doivent pas oublier que la ville est un terrain de jeu, de surprise et d’émerveillement durant ces rencontres. Dans le flux des piétons ou des véhicules, pour une petite jauge, avec ou sans convocation, certains chorégraphes développent alors une écriture artistique résiliente dans l’espace urbain.

Les Oignons dans Les Miniatures / Chorégraphe : Nathalie Pernette, Compagnie Pernette

Cette petite sélection de Lucile vous a plu ? Vous voulez désormais en apprendre davantage sur la façon d’appréhender l’espace public ? Participez à sa formation « Écriture chorégraphique dans l’espace public »  !